Cours n°3

 

L’enseignement du Bouddha Originel.

 

Les grands de ce monde et le Bouddha

Aujourd’hui nous allons commencer par les propos du grand Parménide, qui est né en 540 avant notre ère. Sachez que Parménide a ouvert le champ de la philosophie occidentale et, après l’avoir ouvert, l’a refermé. C’est-à-dire qu’après lui, après son poème, tous les penseurs successifs se sont inclinés, ont baissé la tête, et il a fallut attendre Schopenhauer et Nietzsche pour entendre une pensée un peu pertinente en Occident.

Il ne nous reste que des fragments du poème qu’il avait écrit, et ces fragments sont tellement violents que toute la pensée philosophique ultérieure n’a pu que les mettre de côté en se disant « c’est grand, ça à l’air important mais on ne peut entrer dedans » !

Parménide, dans ces lignes, parle de ce qui existe, c’est-à-dire « l’étant ». Et je vous rappelle qu’en terme de philosophie, l’étant est l’être en tant que phénomène. Je vous lis donc un court passage de son poème sur l’étant:

« Il est tout entier plein d’étant, aussi est-il tout entier continu, car de l’étant touche à de l’étant…

Alors, immobile dans les limites de larges liens, il est sans commencement, sans fin, puisque naissance et mort sont bel et bien dans l’errance au loin, la croyance vraie les a repoussées. Le même et restant dans le même, il se tient en soi-même et c’est ainsi qu’il reste planté là au sol, car la nécessité puissante le tient dans les liens de la limite qui l’enclôt tout autour ; c’est pourquoi il est de règle que l’étant ne soit pas dépourvu d’achèvement. »

C’est, vous l’aurez remarqué, un texte hallucinant, puisque bourré d’éléments contradictoires. En terme de logique si l’on attribut un prédicat à quelque chose, par exemple : « ceci est blanc » on ne peut dire en même temps de la même chose : « ceci est noir ». Cette chose est blanche ou noire. On conviendra que le non blanc est le contradictoire du blanc, et on ne pourra pas dire de la même chose qu’elle est blanche et non blanche. C’est sur cette base, édifiée par Platon, Aristote et d’autres, qu’on a construit une « logique » qui exclut la contradiction des termes définissant un sujet dans un temps donné. Or, dans ce que nous venons de lire de Parménide nous trouvons : « l’étant est plein d’étant », ce qui implique une multiplicité alors que, dans un texte que nous lirons ensuite, Parménide dira de l’étant qu’il est « Un ». Dans le texte lu nous trouvons : ( l’étant est) « tout entier continu, car de l’étant touche à de l’étant… ». Or, s’il est continu puisque de l’étant touche à de l’étant, il est morcelable. Il n’est pas « Un », car composé de parties. Mais Parménide affirme qu’il est « Un » et composé, ce qui ne peut se concevoir.

Ensuite Parménide déclare que l’étant est « immobile », et tout le bon sens commun se dresse en hurlant « comment peut-on dire que le phénomène, l’existant est immobile, alors que tout bouge continûment » ! Et tout le monde voit bien, en effet, que tout se meut, apparaît et disparaît et que rien ne reste immobile. Or, Parménide déclare « , immobile dans les limites de larges liens, il est sans commencement, sans fin, puisque naissance et mort sont bel et bien dans l’errance au loin, la croyance vraie les a repoussées ». Ensuite il affirme : « L’étant est non dépourvu d’achèvement ». Ca c’est formidable ! Parménide déclare que le présent de l’étant est toujours son achèvement, et ce quel que soit l’état et les circonstances propres au sujet. C’est contraire à toutes les logiques relatives à la « maturation », à « l’apprentissage », à la « transmission » de la culture ! Comme si on ne voyait pas avec clarté que nous sommes beaucoup plus malins, nous là maintenant, que ces pauvres grecs s’éclairant à la bougie ! Je plaisante ! Chapeau à toi papa.

En outre Parménide écrit : « . Le même et restant dans le même, il se tient en soi-même et c’est ainsi qu’il reste planté là au sol, car la nécessité puissante le tient dans les liens de la limite qui l’enclôt tout autour ». Dire qu’il n’y a ni naissance ni mort pour le phénomène et qu’il reste planté là au sol, tout en restant le même tout le temps, cela défie la raison dans la mesure où nous voyons tout changer, apparaître et disparaître. Lorsqu’il déclare, en outre, qu’une nécessité puissante le tient, nous ne pouvons imaginer que cette notion de « nécessité » s’éloigne de celle de « karma », puisque ce qui est « nécessaire » ne peut pas manquer de se produire.. Et lorsqu’il écrit « il est de règle que l’étant ne soit pas dépourvu d’achèvement » cela signifie que l’étant, en tant que phénomène, est totalement fini. L’étant est achevé, fini, il s’étend à tout puisque plein d’étant et est immobile, sans naissance ni mort, « Un ».

Voici une autre partie de son poème :

« En étant sans naissance et sans trépas il est entier, seul de sa race et non dépourvu d’achèvement. Jamais il n’était ni ne sera, car il est au présent, tout ensemble, Un, continu ». C’est complètement paradoxal ! « Seul de sa race » signifie qu’il est inconnaissable, incommunicable, seul, il ne naît donc pas de parents. Il est « tout ensemble, Un », or, si l’on dit tout ensemble, ce ne peut être que la réunion de plusieurs et non pas « un » ! « Il est au présent », il n’est donc jamais au passé ni au futur. Le présent, dans ce cas, ne s’inscrit donc pas dans la linéarité passé, présent et futur. Mais n’est-ce pas une atteinte grave à la pensée usuelle ? Ensuite : « Un, continu », mais ce qui est continu est morcelable et ne peut donc se voir attribué le qualificatif de « Un » ! Et depuis Aristote, le point se distingue de la ligne, mais le point ne peut avoir d’épaisseur, sinon il aurait des parties et serait divisible. Or si l’étant est continu, à la manière d’une ligne par exemple, il peut être coupé en deux, en mille. Il est morcelable. Et bien Parménide affirme qu’il est plein d’étant, continu, Un ! Que le non-être n’est pas, qu’il n’y a que l’être ! Qui plus est, drapé de majesté, serein, il déclare : « Et le temps n’est et ne sera quelque chose en plus de l’étant ». Quel panorama grandiose !

Parménide ouvre donc la pensée occidentale sur la philosophie, et la referme, car après lui plus personne n’osera moufter. Aristote aura remis les choses en ordre avec cette merveilleuse pensée tautologique qui fera les beaux jours de la science actuelle et Parménide ne sera plus qu’un objet d’étude pour les cerveaux frileux des philologues. Nul n’a pu reprendre la pensée merveilleusement profonde de Parménide de façon à la faire fructifier. De l’avis de tous, Parménide, on ne peut rien en dire.

 

Voyons maintenant ce qu’il en est chez nous, dans le bouddhisme de Nichiren.

Le Souverain de la Loi déclare « Le grand principe de la Loi Merveilleuse est que l’unicité et la pluralité sont mutuellement identiques dans le temps et dans l’espace ». Il affirme donc que la multiplicité et l’unité sont identiques à travers le temps et l’espace, ce qui est éminemment contradictoire ! Le Un n’est pas le multiple, le multiple n’est pas l’Un. Lui affirme que c’est la même chose, comme le soutenait Parménide, du reste. Le Souverain de la Loi dit également « La substance fondamentale de la Loi, Myoho Renge Kyo, est la simultanéité de la cause et de l’effet ». Cela ne se dit pas, cela n’existe pas. En terme de logique, personne n’oserait soutenir que la cause et l’effet sont simultanés. Car si la cause et l’effet sont simultanés, il n’est pas de cause première. S’il n’est pas de cause première, il n’est pas de création. S’il n’est pas de création, rien n’a d’origine. Si rien n’a d’origine, rien ne peut disparaître. Dans les six voies, serions-nous alors « immobiles dans la limite de larges liens » ? Et il poursuit en disant « La Une pensée instantanée correspond donc, telle quelle, à l’éternité sans commencement ». Quand il dit que la Une pensée instantanée, qui est l’expression même de la simultanéité de la cause et de l’effet, correspond à l’éternité sans commencement, à quoi avons nous donc affaire ? A une pensée, sans « épaisseur » dans le temps, dont on va dire qu’elle est l’éternité sans commencement. Or, qu’une chose qui n’a pas de durée soit l’éternité est contradictoire. Pourtant, telle est bien l’affirmation du Souverain de la Loi. Il déclare, en outre, « Cette Une pensée existe elle-même à l’origine, elle est présente en permanence, et est sans commencement ni fin ».

Nous venons de quitter Parménide, nous entrons dans l’enseignement du Bouddha Originel, et que se passe-t-il ? Nous trouvons des correspondances, des analogies dans la façon de voir et il nous faut donc admettre que l’intuition de Parménide qui, naissant au 5° siècle avant notre ère est évidemment contemporain du Bouddha, partage, touche, pour une part, à l’éveil de Shakyamuni. Pour autant, nous devons signaler que, tant pour le Bouddha Originel Nichiren Daishonin, que pour le Souverain de la Loi, le Bouddha Shakyamuni aurait vécu au 9°siècle avant notre ère. Ce qui laisserai quelques siècles de battement permettant ainsi un échange de pensée entre l’Inde et la Grèce parce que, quoi qu’en disent divers spécialistes effarouchés, les voies de communications terrestres entre l’Asie et l’Europe ont toujours été empruntées et les marchands ont nécessairement véhiculé des idées. Quoi qu’il en soit, nous trouvons une forte similitude dans l’approche de la réalité par Parménide et par le Bouddha. Ce n’est donc que le fait de Platon, d’Aristote et de ceux qui les ont suivis, de placer un maillage, un cadre sur la réalité en affirmant : « Pour un même sujet il ne peut y avoir de prédicats contradictoires ». Et ce, nonobstant les écrits du grand Héraclite qui, entre autres, affirme « Nous sommes et nous ne sommes pas », « Un même est à la fois le chemin qui monte et celui qui descend », « l’eau de mer est à la fois salutaire pour les poissons et mortelle pour les humains », « Le bien et le mal sont tout un », « Le jour et la nuit ne sont qu’un ». Héraclite avait ainsi établi la possibilité de la coexistence de contradictoires. Mais devant l’impossibilité supposée de définir un enseignement pouvant être transmis à la postérité, il fut donc convenu d’exclure les contradictoires. Il s’agit bien, alors, concernant Aristote et ses thuriféraire, d’une logique de frileux, de paresseux, de lâches. Le malheur est que cette « logique » aristotélicienne, plus ou moins cohérente, soit devenue le berceau de notre culture occidentale et qu’elle se répande, par le biais de cette mascarade qu’est « l’exactitude scientifique », dans le monde entier. Nous raisonnons donc naturellement avec cette base « logique » apprise, mais nous devons nous faire à l’idée que dans l’enseignement du Bouddha ce qui peut nous apparaître à nous, humains, comme étant contradictoire, ne l’est pas forcément pour l’Eveillé.

Ainsi, que la Une pensée momentanée n’ait pas d’épaisseur dans le temps et qu’elle soit, en même temps, l’éternité, est la réalité perçue par le Bouddha. C’est à nous, humains, de faire un effort de façon à nous ouvrir, au delà du « contradictoire », à ce qui caractérise au plus haut point notre existence.

Nous l’avons évoqué, Parménide écrit « Le même et restant dans le même, il se tient en soi-même et c’est ainsi qu’il reste planté là au sol ». Or, le Souverain de la Loi déclare :

« Lorsque le Bouddha révèle la présence permanente du triple corps du Bouddha, les êtres humains peuvent s’éveiller à l’éternité de leur personnalité ». La personnalité est donc permanente et, au sein des six premières voies, il s’agit bien de « Le même et restant dans le même, il se tient en soi-même et c’est ainsi qu’il reste planté là au sol ».

Quand Parménide affirme : « L’étant se tient dans la limite de larges liens… L’étant touche à l’étant », le Souverain de la Loi, quant à lui déclare « Ce n’est pas seulement l’individu, mais il est clair que les végétaux et l’ensemble de territoire sont présents dans la substance intérieure du Bouddha et donc que l’intégralité du monde des phénomènes de l’univers est le corps des œuvres et vertus du Bouddha ». Il est donc affirmé là que l’intégralité du monde phénoménal est toujours l’expression des œuvres et vertus de chacun d’entre nous. Et c’est bien ce que voyait Parménide : « Planté là,…dans le sol,… le même, …L’étant se tient dans la limite de larges liens… » puisqu’il concevait l’étant comme une sphère. Et après tout, si l’on considère l’étant et l’intégralité du monde qu’il « entraîne », pourquoi ne pas utiliser le terme de sphère ? Tout dépend du regard que l’on porte sur l’étant et je suis plus proche de son point de vue que de celui d’Aristote qui déclare naïvement qu’un corps est limité par une surface ! En outre, que dit le grand Empédocle ?: « L’Un est sphérique, éternel et immobile. L’Un est la nécessité ». C’est pas beau ça ?

Donc, dans l’enseignement du Bouddha, l’instantanéité de l’existant, qui est la simultanéité de la cause et de l’effet, est un corps unique dans lequel rien ne peut ni apparaître ni disparaître. Son nom est Myoho Renge Kyo. Dans l’instant, tout est un corps unique. Or, c’est le propre de l’humain que d’établir, à chaque instant, des distinctions entre ce qui est « lui » et ce qui ne l’est pas mais, en réalité, tout touche à tout, tout est un seul corps, infini. Chaque phénomène contient l’ensemble des phénomènes.

Jean-Denis : N’est-ce pas une figure de style lorsque Nichiren déclare que « l’entité de la vie humaine ne peut ni apparaître ni disparaître » ? Car l’humanité, telle qu’on la définit, peut être amenée à disparaître.

Non ! Bien sur que non ! C’est un point de vue bien étroit que de considérer l’état de tranquillité, ou d’homme, comme un fait uniquement terrestre ! Le Bouddha Originel enseigne : « Si mes disciples ouvrent les yeux sur le chapitre Durée de la vie du sutra du Lotus ils percevront que les dix mondes sont, à l’origine ». Donc, il ne peut se faire que l’un des dix mondes, l’état de tranquillité en l’occurrence, voit son existence dépendre du regard subjectif d’un quelconque « scientifique » affirmant « il y a » ou « il n’y a pas » de corps. Les dix mondes existent en permanence et ont donc toujours un « lieu ». Et, de fait, il y a toujours une bonne raison « logique », surtout a posteriori, pour que l’état humain, ou un autre état, perçoive les objets de sa propension. En outre, on ne voit rien, en réalité, des corps. C’est un des paradoxes de la condition humaine. Par exemple, tout le monde voit bien qu’il « existe », tout le monde est certain qu’il est bien « lui-même », tout le monde constate en outre que tout change. Donc, le même individu peut « savoir » à la fois qu’il est le « même » et qu’il n’est pas le « même ». Ce qui est contradictoire. Si vous prenez en main une photo de vous, il y a trente ans, et la comparez à ce que vous êtes maintenant, vous pouvez à la fois penser que vous êtes la même personne, et noter les différences qui vous sautent aux yeux. Nous sommes, nous, humains, coincés dans ce regard, lieu d’antinomies. Lorsque l’enseignement affirme que, dans l’instantanéité, tout n’est qu’un corps, cela signifie que l’infinité phénoménale surgit de ce corps unique à chaque instant. L’infinité phénoménale surgit, et retourne dans ce corps, en étant achevée à chaque instant. Tout est toujours achevé, et tout utilise l’ensemble pour manifester cet achèvement. L’instantanéité des choses est la terreur de la pensée serve. Quant au fait que si tout est instantané tout, nécessairement, est lié dans une coïncidence immobile et absolue de l’existant, l’esprit alors s’effondre, hagard et terrorisé.

Personne ne considère le repas qu’il va déguster en se disant « tiens ! c’est moi », ni ne va sortir des toilettes en se disant « je viens de perdre de mon « moi ». Autrement dit on ne peut s’identifier ni à ce qui va nous constituer, ni à ce qui nous a constitué. Et pourtant, à chaque instant, nous ne sommes constitués que d’apports et de rejets de ce que nous percevons comme « extérieur ». Le sentiment d’un « moi » constant va donc s’appuyer sur une transformation continue, quoi qu’invisible, et quand bien même nous savons théoriquement, grâce à la science, que la matière, en tant que telle, n’est que de l’énergie, c’est à dire un échange constant entre des masses atomiques ici ou là, même si l’on sait que nous sommes continûment traversés par des neutrinos ou autres bêtes innommables et invisibles, on ne peut rien réaliser de cela. C’est un des défauts de la science. Nous verrons toujours des « corps ». Pour autant, qu’on le veuille ou non, il y a nécessairement à chaque instant un échange constant et une modification constante du corps, de la pensée, et de l’environnement. L’instant, c’est le corps unique de toutes les virtualités. Alors, que l’humain décrète « là il y a un corps », ou « là il n’y a pas de corps », n’est pas d’une grande importance quant à l’aspect réel des choses, cela permet juste de distinguer la porte du frigo de celle des W.C..

Concernant le corps, Miao Le de l’école Tiantai, affirme «  La forme, étant d’existence réelle, est dite non destructible ; bien que l’on ne puisse la détruire, en raison de son instantanéité, on dit que la forme est vacuité ». Ainsi, la forme, comme le soutiennent certaines écoles, est vacuité, cependant étant instantanée, elle est non destructible et, enfin, étant d’existence réelle elle est, dans notre école, la voie médiane. Cela signifie qu’il ne peut y avoir « non-forme » et ceci est l’existence réelle. Le corps est donc permanent. Ce n’est que l’humain qui pense voir ou ne pas voir un corps, selon ses sens. « Le non-être n’est pas » affirme Parménide.

Nancy : Mais, si je me retrouve incinérée !

Ca ne veut rien dire mon ange. Il y a un certain temps, j’ai vu un reportage sur la vie intra utérine. On y voit une sphère contenant le patrimoine génétique du mâle s’approcher d’une sphère contenant le patrimoine génétique de la mère. Les deux sphères vont bientôt en faire une seule, mais la question « sommes nous deux, avant d’être un ? », ou « qu’est donc la Une pensée nous caractérisant dans ce cas là ? », n’est qu’une vue humaine. C’est aussi naïf que de se demander lequel, de la poule ou de son œuf est le premier, laquelle, de l’araignée ou de sa toile est la première, lequel, du castor et de son barrage est le premier ! Ce n’est pas deux, c’est Un. Donc, les deux sphères sont la personnalité, sont la Une pensée. Toute l’architecture qui va se manifester visuellement, c’est-à-dire le « vouloir/forme », est antérieure à la réunion des éléments constitutifs. Nous, humains, à un moment, nous verrons quelque chose de nommable. Mais que nous puissions voir et nommer ou non, la forme est permanente. Parfois la forme est visible, parfois moins, parfois elle ne nous l’est pas. Nous nous voyons continus, alors que nous sommes instantanés. Nous nous voyons séparés de ce qui n’est pas nous, alors que nous fusionnons, qu’on le veuille ou non, avec l’environnement. Nous sommes bien surs, de temps en temps, que nous vieillissons, alors que Nagarjuna a écrit : «  Si les choses durent, rien ne peut vieillir ; si les choses ne durent pas, rien ne peut vieillir ». Aurait-il tort ?

Nous ne voyons donc rien du tout de notre réalité. On ne peut pas dire « j’étais davantage moi-même à dix huit ans que je ne le suis maintenant à cinquante trois ans » ! Si l’on vous dit que tout corps n’est que de l’énergie en inter-action, vous pouvez l’admettre, mais dans ce cas comment allez vous chercher, comment allez vous nommer ce que vous chérissez tant ? Aristote a effectivement dit que le corps est ce qui est limité par une surface, mais c’est sans signification. Arrêtons de ne nous fier qu’à une vue humaine, tout au moins essayons, pour avancer un peu. Imaginez que des scientifiques nous imposent de nommer le bleu 1278, le rouge1532 et le vert1845 parce que c’est le nombre de leur vibrations. Même si cela est, d’un point de vue particulier, exact, nous continuerons à dire « Oh ! la belle bleue » !

Nos sens, comme les sens de tout ce qui est, sont limitatifs, ce qui les dépassent n’existe pas pour nous. Mais, comme l’a déclaré Nietzsche, ce n’est pas une raison pour que cela n’existe pas.

Prenez ce beau gosse, jeune, en pleine forme, quittant sa femme le matin et à qui l’on dit : « Avec ton hélico, va donc prendre des photos au dessus du réacteur qui a pété ce matin ». Le type y va, il prend ses photos, il revient, tout va bien. Il meurt cinq heures après. Entre ce qu’il a vu, lui, en train de faire ce qu’il avait à faire, et ce qu’il a senti à ce moment, il n’y a aucun rapport avec sa réalité. Il na pas vu de petites boules radio-actives lui perforer la peau. Il n’a rien vu, il n’a rien senti, il est mort quand même ! Ce que l’on voit des échanges instantanés entre le corps et l’environnement, c’est peanuts, en regard de la réalité. A chaque instant nous sommes en relation intime, en fusion avec ce dont nous provenons et ou nous retournons.

Souvenons nous que le Bouddha Shakyamuni affirme qu’un dharma, un phénomène, naît et meurt soixante quatre fois dans le temps d’un claquement de doigts. Que l’on décrète « ceci est mort » ou « ceci est né », il s’agit en fait d’une infinité de naissances et de morts que, dans les deux cas, nous ne pouvons percevoir.

Pour cette raison, Parménide disait « Sans naissance ni mort, puisque la croyance juste les a repoussées au loin ». Parménide a « vu » que cela n’existait pas. Ce qui est, dans l’instant, avec ses qualités particulières qui en font un individu unique, singulier, « seul de sa race », ne peut venir de rien. « Il me semble que tout a beaucoup trop de valeur pour que ce doive être aussi fugitif… Ma consolation est que tout ce qui fut est éternel : la mer le ramène à la surface » écrit Nietzsche. Les grecs avant Socrate en était intimement persuadés : rien ne peut venir de rien. « Rien ne naît du néant » affirment Empédocle et Anaxagore. Tous les phénomènes son permanents. Il n’y a pas de création ex nihilo. Ce qui est ne peut naître de quelque chose. « Il est impossible que les phénomènes puissent être des causes » rugit le grand Nietzsche. Rien ne vient d’une chose identique, sinon ce serait deux fois le même, ni de quelque chose de différent, sinon des graines de peupliers pourraient donner une fois des figues, une fois des morues.

Le Souverain de la Loi a déclaré : « A l’époque de Shakyamuni, lors de la cérémonie du Sutra du Lotus, ses disciples s’éveillèrent à l’identité de leur corps, omniprésent dans le temps et dans l’espace, et du monde des phénomènes ». Mais dire que le corps est le monde des phénomènes, et que ce monde des phénomènes qu’est le corps est omniprésent dans le temps et dans l’espace, est inconcevable. Nul ne peut voir son corps comme étant l’infinité phénoménale, et nul ne peut se voir omniprésent dans le temps et dans l’espace. Nous ne le pouvons pas. Le Bouddha, lui, le voit. Le Souverain de la Loi l’affirme. Si nous ne rejetons pas ce type de propos, si on le garde en soi, nous pouvons alors nous y éveiller. Croire, dans ce cas, permet de « voir ». Le Bouddha n’a pas de croyance, l’éveillé voit. Voyant des objets, qui proviennent de son état intérieur, ils les désigne par des mots. Si nous, disciples, prenons ces objets sans les rejeter, les gardons en nous, et bien le fait de croire permet d’ouvrir la vue sur les objets désignés. C’est l’objet, dès lors, qui entraîne la vue.

Il convient de se souvenir que tout est instantané, que dans l’instant tout est lié, qu’il y a identité entre le corps et le monde des phénomènes, que rien ne peut ni apparaître ni disparaître. Que tout, donc, dans les six voies, est immuable, immobile, identique à lui-même, inconditionné, absolu. Ce sont des notions que l’on ne peut pas « comprendre » mais qu’il faut garder fermement en nous, quand bien même elles nous paraîtraient parfois contradictoires, de façon à ce que notre esprit s’y heurte continûment. On peut alors, au fur et à mesure « voir », nous y éveiller physiquement.

Nancy : C’est physique.

Bien sur, c’est physique. Entrant dans la voie bouddhique, nous devenons la voie. Zhiyi, à ce propos, déclare : « Je, est le seigneur des oreilles ».

Nancy : Je ?

Oui, le grand « Je ». Celui qui est modifié par l’écoute des enseignements du Bouddha, et qui atteint l’éveil. Ce grand « je », le seigneur des oreilles, est celui qui défini l’envergure de la faculté auditive, et l’envergure des autres facultés, du reste. Donc, plus on fait entrer en soi l’enseignement du Bouddha, et plus les facultés humaines usuelles se développent en fonction des objets que l’enseignement contient. Dès lors, ce qui présidait à un « vouloir/voir » particulier, change. C’est un « Je » augmenté par la grandeur, la valeur, de l’entendu.

Michèle : C’est l’état qui est désigné par le terme d’absorption, dans le Bouddhisme ?

Ah non. C’est plus que ça. Hors des six voies il y a l’état d’écoute, sous entendu de l’enseignement bouddhique, l’état d’éveil par les facteurs, de bodhisattva et de Bouddha.

Michèle : Alors c’est davantage l’état d’éveil par les facteurs.

Certainement. Parce que, comprenez bien, l’absorption ne veut rien dire en soi. Si la pensée est un effet instantané, le terme d’absorption n’a pas de sens, il est sans substance. Il n’y a pas une instance qui serait l’esprit numéro un, qui prendrait l’esprit numéro deux, et qui le ferait s’absorber dans un sujet de réflexion. Il en va de même pour la « concentration », on peut presser sur un tuyau d’arrosage pour en concentrer le jet, mais on ne peut, avec un esprit numéro un presser sur un esprit numéro deux afin de le « concentrer ». Dans notre école, la concentration, immobile dans l’espace, c’est l’objet, à savoir l’objet fondamental de vénération pour l’introspection du cœur.

Jean-Denis : C’est la perception qui change, c’est l’état intérieur qui change. Au lieu d’avoir une vision étriquée, celle-ci s’ouvre.

C’est cela. Et pour éviter le concept utopique et délétère « d’accumulation » des choses, puisque tout est instantané, convenons du fait que, tout étant sans commencement ni fin, rien ne peut s’accumuler. Tout est permanent et, plutôt que de se concevoir comme une « accumulation » de bonnes ou de mauvaises œuvres, mieux vaut réaliser que nous sommes à chaque instant autres. Nous surgissons à chaque instant avec des racines de bien modifiées. Si tout est instantané il ne peut y avoir de temps ni d’espace en soi. Ni de point de départ à cet état de fait. Si tout est effet, rien n’a d’origine. La causalité linéaire, alors, s’effondre, inadéquate. Le Souverain de la Loi a affirmé : « Notre corps, ou nous-mêmes, existons en fonction des causes et des conditions, et nous montrons l’aspect des effets et des rétributions ». Si nous sommes le fruit provisoire d’une infinité, rien n’a d’origine. Tout existe alors en tant que rétribution. N’allez pas penser que Moncelon développe une nouvelle doctrine selon laquelle tout serait effet. C’est Nichiren Daishonin, Shakyamuni, et le grand patriarche qui l’enseignent. Moi je ne peux que vous transmettre ce que les saints ont déclaré. Le corps est un effet, la pensée est un effet, et nous n’avons, en réalité, jamais la possibilité d’utiliser notre pensée. Se concentrer n’existe donc pas. Il n’y a jamais d’acte, en terme de cause, dans le monde humain. La « volonté » est une conséquence, pas une cause. Il en va de même pour la « décision », pour le « vouloir », ce sont des foutaises ! La responsabilité des actes est une souffrance inutile.

La souffrance mentale, l’angoisse, tournent autour de sujets mentaux qui peuvent être déracinés, si on se remet continûment en tête que tout est instantané, que tout est effet. Cela libère de souffrance mentales aussi inutiles qu’irréalistes telles « j’aurais pas dû, j’aurais dû, si j’avais su, etc… ». Toute cette agitation onirique est souffrance. Que nous souffrions à cause de ceci ou nous réjouissions à cause de cela est un constat humain, cela apparaît, c’est comme ça. Si la « volonté » existait tout les êtres seraient heureux, puisque c’est ce qu’ils cherchent. Le Souverain de la Loi déclare que tout existe en fonction des causes et des conditions, c’est-à-dire provient de… Les causes c’est le « karma », nyoze in, les conditions sont ce qui est extérieur à la pensée momentanée, nyoze en. Donc, lorsqu’il est affirmé que tout provient des causes/conditions, c’est quelque chose que nous ne pouvons voir puisque c’est immédiatement antérieur au fait perceptif. Nous ne pouvons que constater l’effet dans le monde phénoménal et ce constat est la rétribution des actes depuis une infinité. Et puisque nous ne pouvons que constater l’effet, nous sommes en permanence cloués à une conditionnalité qui nous pète au visage. Mais à tous les instants où cette conditionnalité se modifie on est déjà le passé de notre réalité.

Le Souverain de la Loi a expliqué que le bouddhisme traite de la vacuité générale des êtres et des choses, mais les êtres humains ne peuvent voir que la conditionnalité. « Ceci s’est mué en cela, il m’est arrivé ceci, je pense cela, j’ai chaud, j’ai froid », on ne voit que la conditionnalité. Suivent ensuite le remords, les décisions, mais tout cela est de la fumisterie. Nous ne pouvons ni apprécier les causes, ni mesurer l’envergure environnementale des conditions de notre propre existence instantanée. En outre souvenons-nous que les causes et les conditions sont non-deux. Ce qui est humainement inconcevable. En d’autres termes, cette non-dualité signifie que l’intégralité de notre environnement et de notre corps, antérieurs à l’apparition de l’effet, sont Un. L’intégralité de l’infinité phénoménale et le corps du sujet sont Un, alors que nous pensons pouvoir dénombrer une multitude, mais il s’agit d’un Un antérieur à l’apparition de l’effet.

A l’ordinaire, les êtres sont enferrés dans une « logique » selon laquelle une cause entraîne un effet. Le train a déraillé à cause d’une roue qui a explosé, elle a explosé car l’atelier où elle a été construite a failli, c’est l’ouvrier untel qui, il y a dix ans, vingt cinq morts c’est beaucoup …etc. Cela ne veut bien sûr rien dire, mais les humains ne peuvent « voir » que ce type de causalité. L’apparition de la mort ne s’explique, pour eux, que par l’immédiate antériorité du phénomène dans le temps. Or, il en va de même pour tout, nous sommes tous persuadés que ce que nous sommes provient de l’antériorité phénoménale. Si cette étagère me tombe sur la tête, j’ai mal. Nous pouvons toujours invoquer l’antériorité phénoménale pour justifier le présent. En réalité, à chaque instant tout naît et disparaît soixante quatre fois, affirmait Shakyamuni. Jamais l’être n’a d’antériorité temporelle. Il n’est pas de « sujet » persistant à l’identique. Il n’est qu’harmonie globale, de l’enfer à l’éveil ultime. Tout est présent en permanence et l’étant touche à l’étant. C’est une chose que nous ne pouvons voir facilement mais, puisque le Bouddha l’affirme, il faut le garder en soi et s’y éveiller. C’est la meilleure chose que nous puissions faire dans notre existence.

Nous lisons, dans le même sens : « Le véritable aspect des phénomènes est situé avant le discernement où la distinction ». Le véritable aspect de notre vie est donc toujours antérieur au fait d’entendre, de voir, de sentir, de penser. On ne peut que « voir » l’effet. Le Souverain de la Loi a déclaré que les saints qui se sont éveillés ont rejeté la vie qu’ils subissaient depuis un temps infini. Parce que l’existence s’impose.

Brigitte : Comme le corps.

Bien sur, et la pensée. Et les facultés perceptives qui nous caractérisent et nous limitent. Tous les saints ont donc, à un moment, rejeté ou illuminé la vie qu’ils subissaient jusque là. Subir désigne l’être humain ordinaire qui n’est qu’effet consécutif. Cela arrive, cela se produit, c’est comme ça. A un moment, nécessairement, on doit rejeter ou éclairer, s’éveiller en somme à ce flux de causes/conditions qui nous façonne à notre insu. A ce moment nous réalisons que, pratiquant la voie, nous existons par bienveillance envers l’infinité des êtres.

Michèle : En pratiquant.

C’est clair. Ce n’est que la récitation de Nam Myoho Renge Kyo matin et soir. La pratique constitue le seul moyen de soulever ces adhérences délétères, ces flux de pensées nauséabonds que nous nommons « moi ».

A propos de la sagesse incommensurable du Bouddha, Nichiren déclare que c’est « Réaliser l’effet des dix ainsi de l’aspect réel comme étant la substance fondamentale de la Loi ». Encore une fois, qu’il y ait un corps, un esprit, une corporéité, une puissance potentielle, une volition, etc.., tout cela apparaît en tant qu’effet. Réaliser que tout ce qui est apparaît en tant qu’effet, et que telle est la substance de la Loi, Myoho Renge Kyo, est l’éveil du Bouddha à la merveille de la simultanéité de la cause et de l’effet. A cela nous pouvons, nous aussi, nous éveiller. Autrement dit, l’intégralité des phénomènes est Myoho Renge Kyo. Mais rien ne naît d’une antériorité temporelle puisque phénoménale. Tout naît et disparaît à chaque instant. Dès lors, aucun phénomène n’est influencé ou fait par un autre phénomène. Tout phénomène est absolu. Il est lui-même un corps infini, s’étendant à tout. Il montre sa singularité en jaillissant et en retournant dans le même instant dans ce dont il provient et qui le constitue.

Brigitte : Donc personne ne peut rien faire sur quoi que ce soit.

Exact ! Sauf si l’on entre dans la voie bouddhique ! Car dans les six voies rien ne peut être efficace puisque tout est effet. Il faut sortir du cycle des six voies et « sortir » signifie « entendre » l’enseignement du Bouddha. Dans son enseignement Nichiren traite du « degré de dénomination où l’être ordinaire est identique à l’ultime ». Entendre Nam Myoho Renge Kyo et le nommer permet, au sein des troubles, l’apparition immédiate du Corps de la Loi du Bouddha en tant qu’effet.

Concernant le fait que l’existence est un effet, Schopenhauer a écrit : « La conscience s’est toujours révélée à moi non comme cause mais comme produit et résultat de la vie organique ».

Roberte : C’est clair.

Très clair. La pensée n’est pas un acte. Hop ! Ca apparaît. Que nous dit le grand Parménide à ce propos ? « De la manière dont à chaque fois la nécessité tient le mélange des membres aux courbes nombreuses, ainsi la pensée se présente aux hommes ; car c’est un même ce dont s’avise la nature des membres pour tous les hommes et pour tout, car ce qui prédomine est pensée ». La nécessité, c’est-à-dire ce qui ne peut pas ne pas être, le « karma » en d’autres termes, à chaque instant organise l’architecture globale des membres de l’être. Du fait de l’architecture provisoire de l’être, et de tout, dit-il finement, une pensée émerge. La pensée sourde donc du corps. Et encore une fois, ce qui provient d’une architecture globale ne saurait être une cause.

Parménide écrit également « Un même est à la fois être pensé et être ». Je sais que certains philologues traduiraient autrement cette phrase, mais nous ne sommes pas contraints de partager leurs terreurs enfantines. La pensée est un effet. Etre, c’est être pensé. Et, de la même manière que, lorsque vous avez un rhume, vous ne dites pas « Allo, c’est rhume à l’appareil », lorsqu’une pensée survient en vous, elle qui n’est pas différente d’un rhume, vous ne pouvez en toute logique dire « Je pense ceci ». Or, il se fait que les êtres souffrent leur vie durant parce qu’ils s’identifient à ce qui s’impose dans leur petit crane. Quand ils ont un rhume ils se disent « Bon ! J’ai un rhume, mais quand j’aurais plus de rhume j’irai mieux ». Mais quand des pensées surviennent, au même titre qu’un rhume, ils pensent à tort en être les auteurs.

Nancy : Idem pour les jugements.

Certes. Nous lisons, dans le Majjhima Nikaya de Shakyamuni : « Mon disciple, ayant arraché le penchant pour l’idée fausse et la présomption : « Je suis », ayant rejeté l’ignorance et ayant obtenu la connaissance, est libéré de la souffrance dans la vie présente ». Descartes est donc un abruti ! Pis encore, un être malfaisant. «  Je suis », «  j’existe », « Moi », sont les causes de la souffrance dans la mesure où un effet ne peut être un « sujet » support de l’acte. Il n’est pas de « Je » perdurant à l’identique. « Moi » est un constat tardif et protéiforme. Il ne peut servir de support pour une quelconque « identité ». Toutes les souffrances mentales naissent de cette confusion. Shakyamuni déclare également : «  Toutes ces idées relatives à la théorie du Moi ou à la théorie du Monde, le disciple les abandonnent. Il se dit « Ceci n’est pas à moi, je ne suis pas ceci, ceci n’est pas mon égo » ». Donc, tant l’idée du « Moi » que celle d’un « monde », dans lequel on serait, sont des idées qu’il faut rejeter. Alors même qu’elles s’imposent à chaque instant. Et souvenons nous que le sentiment d’être « dans un monde » a fait les beaux jours d’un grand nombre d’esprits immatures en vain, en pure perte, si ce n’est les angoisses soulevées et répandues.

Humainement, nous sommes dans l’obligation de distinguer un « Moi » au sein d’un « Monde », mais Shakyamuni nous incite à sortir de ce type de souffrance par ces mots : « Ceci n’est pas à moi, je ne suis pas ceci, ceci n’est pas mon égo ». Il est clair que pour ce qui est de la vie ordinaire, distinguer les objets dans le temps et dans l’espace est utile. Par contre, lors de la pratique quotidienne de la voie, au moment ou des flux d’idées nous caractérisant émergent en notre esprit, l’ascèse, consistant à réciter Nam Myoho Renge Kyo devant l’objet fondamental de vénération pour l’observation du cœur, nous permet de ne pas nous identifier en terme de « Moi ». Tout ces flux d’images récurrents tels « Je suis bien trop con », « Trop vieux », « j’ai de trop grosses fesses », « je n’y arrive jamais », enfin tout ce qui nous caractérise en propre peut être rejeté lors de la pratique. Si nous ne nous identifions pas à ces choses et les rejetons comme « non moi », alors, à ce moment, l’infinité des états et des phénomènes peuvent naître en nous. Or, certains esprits superficiels, inquiets, se disent : « Si je pense pas à moi…

Rires de l’assistance : « On va se perdre .. ! »

Voilà, « Je vais me perdre » ou « Personne ne va le faire à ma place ». Mais c’est aussi puéril que de penser « Si j’arrête de penser à respirer, je vais mourir étouffé ». Il y a peut-être des personnes qui vivent et pensent comme cela, inquiets pour leur respiration. Mais rares sont probablement les êtres morts de ce type d’oubli ! Ce n’est pas quelque chose auquel il faut consacrer sa pensée toute la journée.

Certains pensent peut-être qu’il y a une forme de liberté dans la volonté, bien que celle-ci ne soit qu’un effet. Et bien, essayez donc, et chacun peut le faire, de décider et de réciter trois minutes Nam Myoho Renge Kyo en pensant Myo, quand vous prononcez Myo, en pensant Ho, lorsque vous prononcez Ho, et ainsi de suite. Vous le constaterez, votre esprit est assailli par une foule d’objets qui viennent s’intercaler à votre insu, de force, et ce que vous nommiez votre volonté est incapable de tenir, ferme, ne serait-ce qu’une minute, son objectif. Alors que vous étiez persuadés que, trois minutes, ce n’est pas beaucoup pour une volonté moyenne, et bien les pensées indésirables filent comme des flèches, irrépressibles. Ou encore, essayez de fixer le caractère Myo, sur le Honzon, sans autre pensée, une minute seulement, grâce à votre « volonté ». Vous pourrez mesurer à quel point votre esprit est le jouet de forces irrépressibles. Mais vous pourrez toujours croire que c’est bien « vous-mêmes », parce que cela ne se produit pas chez le voisin. Toujours, le « Moi » s’impose. Mais s’il s’impose, justement, ce n’est ni un acte, ni une cause.

Le grand Nietzsche a déclaré : « Sentir, vouloir, penser ne témoignent partout que de phénomènes terminaux dont les causes me sont tout à fait inconnues ». Ca me paraît clair. Il a également affirmé : « Je ne concède pas que le « Moi » est ce qui pense : bien plutôt je considère le moi lui-même comme une construction de la pensée. C’est une fiction régulatrice ».

Nancy : C’est beau.

Sévère mais juste. Et ceci encore : « La pensée surgit en moi- d’où provient-elle ? A travers quoi ? Je l’ignore. Elle se présente, indépendamment de ma volonté… Qui accomplit tout cela ? Je n’en sais rien et suis certainement plus le spectateur que l’initiateur d’un tel processus ».

Il dit également : « Ce qui a été vécu survit « dans la mémoire » ; qu’il « fasse retour », je n’y peux rien, la volonté n’y intervient pas, pas plus que dans la venue d’aucune pensée… Qui l’appelle ? L’éveille ? ».

Enfin, dernière citation de Nietzsche pour le moment : « L’origine d’une pensée reste cachée ; il est très vraisemblable que cette pensée ne soit que le symptôme d’une situation beaucoup plus vaste et complexe… Tout ceci est, sous forme de signes, l’expression de quelque aspect de notre état général ». On peut retrouver, dans ces quelques citations de Nietzsche, une pensée qui, de Parménide à Schopenhauer, se rapproche de celle de l’éveillé. Que dire, en outre, du point de vue d’Empédocle : « L’intelligence se nourrit dans les flots du sang bouillonnant. C’est principalement de là que vient ce qu’on appelle la pensée humaine ; car le sang qui afflue autour du cœur est proprement la pensée ».

Jean-Claude : C’est à la fois surprenant et rassurant.

Voyons maintenant l’apport de Heidegger sur ce sujet. Heidegger va traiter de la pensée en tant qu’effet, mais en terme d’écoute de la parole. « Désigner la pensée comme écoute dépayse » affirme-t-il. Et il est vrai qu’entendre ne peut constituer un acte.

Il déclare également : « La parole parle elle-même ». Et, plus précisément encore : « La parole est toujours déjà en avance sur nous. Nous ne faisons jamais que parler à sa suite ». N’est-ce pas d’une grande justesse ?

Que nous transmet le Souverain de la Loi à ce propos : « Il arrive fréquemment que, au sein de notre relation quotidienne avec la matière, nous agissions centrés sur notre cœur qui dirige notre corps. Aussi, lorsque vous sentez une démangeaison, vous vous grattez. C’est dans cette situation que le cœur dirige le corps ». Le « cœur », dans notre école, désigne ce d’où provient la pensée. Ainsi le Bouddha Originel déclare : « Seul est appelé merveilleux cela d’inconcevable qui est le cœur de notre Une pensée. Inconcevable signifie que ni l’esprit, ni les mots, ne peuvent l’atteindre ». Il est de fait que la Une pensée ne peut observer ce dont elle est issue à chaque instant. Quant aux mots, qui ne sont que la transposition de la pensée, ils le peuvent encore moins. Ce dont nous provenons à chaque instant n’est pas atteignable par la réflexion. Par contre, nous pouvons nous y éveiller.

L’origine dont sourde la pensée est donc nécessairement l’interaction du corps et de son environnement. L’interaction du corps et de son environnement, qui sont non-deux, est donc le présent de notre réalité alors que la pensée, continûment consécutive, est le passé de notre réalité immédiate.

Désirant traiter de ceci du point de vue de l’illusion, le Souverain de la Loi continue de la manière suivante : « C’est là notre réalité tant que nous sommes vivants. Une fois morts, le cœur ne peut plus diriger le corps par sa force. Si l’on réfléchit lorsque nous sommes vivants, à la forme que cela revêt, c’est quelque chose que l’on comprend ». On peut, effectivement, réaliser de notre vivant que le corps s’impose, que l’environnement s’impose, et que la pensée apparaît sans que nous en soyons le maître. Il est dès lors concevable de penser que ce phénomène, n’étant pas de notre ressort, perdure, sans origine, et que seule l’illusion caractérisant l’humain nous plonge dans la terreur des apparitions et des disparitions. Cette même illusion, en outre, nous enlise dans le sentiment délétère d’être des individus « volontaires ».

Il déclare ensuite, toujours sous l’angle de l’illusion : « Nous pouvons réciter Nam Myoho Renge Kyo de notre vivant. Une fois morts, nous ne pouvons plus le faire de notre propre initiative, même si nous pratiquions de notre vivant ». Et, du point de vue de l’illusion, cela semble aller de soit. Il poursuit cependant ainsi : « En raison de divers actes commis par le passé, ceux qui ne pratiquent pas ont l’esprit tourmenté. Ils ne peuvent rien y faire d’eux-mêmes. Dans ce cas, le corps physique existe encore ». Autrement dit, aussi bien à travers la « vie » qu’à travers la « mort », qui, dit-il, ne sont qu’un, il y a permanence de la rétribution des actes. « Dans la forme, on fait la distinction entre la vie et la mort. Mais elles sont liées et ne forment qu’un » affirme-t-il. Pourquoi, parce que naissance et disparition ne sont que l’expression d’une vue étriquée : la vue humaine. « Demeurés ! Oui, leur vue, je le vois, est bien courte, puisqu’ils forgent l’idée qu’un non-étant pourrait à l’être parvenir, ou bien que quelque chose pourrait bien en mourrant tout entier disparaître » hurle Empédocle.

Dans un commentaire sur la « Transmission orale sur l’éveil des végétaux » le Souverain de la Loi enseigne : « Le corps de la Loi est permanent, immuable, il s’agit du corps de la vérité universelle inconcevable. Le corps de vérité lui-même, apparaît sous la forme des causes, conditions, effets et rétributions de toutes les choses et phénomènes… Toutes les choses en naissent et y retournent ». Nous rejoignons là les dires de Shakyamuni selon lesquels un phénomène naît et meurt soixante quatre fois dans l’espace d’un claquement de doigt. Cela correspond également à cette affirmation de Vasubandhu : « L’instant, c’est l’acquisition de la nature propre périssant immédiatement ».

Et, concernant plus particulièrement le monde de l’esprit, le commentaire enseigne : « Toutes sortes d’éléments apparaissent au niveau de la mort du monde des dharma. Leur manière d’être régit l’esprit, les êtres sensitifs qui vivent concrètement ». « Le niveau de la mort » désigne la vacuité, en opposition avec ce qui est bien réel. Toutes sortes d’éléments naissent donc, à chaque instant, de la vacuité, et leur apparition provisoire constitue ce que la personne va tenir pour sa propre pensée. La pensée des êtres est donc régie par cette profusion d’apparitions, et nous retrouvons là Parménide qui disait : « La proportion du mélange, c’est cela qui constitue la pensée ». La nécessité organisant l’architecture provisoire du corps s’exprime, en la pensée du sujet, comme un objet de la « perception ». Ces pensées qui montent continûment en nous sont irrépressibles. Toutes ces choses naissent du corps de la Loi, régissent l’esprit des êtres animés, et retournent dans le corps de la Loi. Où, si l’on préfère, tout ce qui est, tout phénomène est Une pensée. Tout phénomène provisoire, votre concierge, une poussière ou votre kangourou préféré, existe selon ce mode. Nous, humains, établirons des groupes de formes, des espèces, établirons des discriminations mais, en réalité, tout est Une pensée. « La parole parle elle-même… Elle doit nécessairement, à sa façon, nous adresser elle-même la parole » disait Heidegger et, plus précisément encore : « Entendre est inséparable de vibrer ». Les mots sont différents de ceux employés par le Bouddha mais le principe perçu est le même. Que l’on dise « entendre », « vibrer », « voir », « sentir » est une même chose se présentant en terme d’effet. Dans une approche similaire Nietzsche a déclaré : « Penser, à l’état primitif, est un processus où des formes, se composant, s’imposent, comme dans le cristal ». Voilà qui est honnête. Les pensées s’imposent. S’attacher à « sa » pensée est donc présomptueux.

Quelle est donc la solution, s’il en est, à se problème insoluble. La maîtrise de sa pensée par soi-même ? Futile ! Notre conscience est son passé. Faire le vide dans son esprit ? Impossible, il est tout le temps plein.

Tout à l’heure nous disions que réciter Nam Myoho Renge Kyo devant l’objet est le moyen, laissé par le Bouddha Originel, pour se détacher du « moi » et faire apparaître l’éveil.

Selon le maître Zhiyi, il en est comme de mettre un fer rougit sur une enclume et de le façonner avec un marteau. L’objet de vénération représente l’enclume, le fer est l’esprit, et le marteau correspond à la pratique quotidienne. Pour Zhiyi, à son époque, l’objet était constitué de la triple vérité, c’est-à-dire de la fusion de la vacuité, de la conditionnalité et de la médianité. Ce n’était pas forcément simple pour les pratiquants de son époque. Pour nous, l’objet est le Honzon. Le Honzon est donc l’enclume sur laquelle notre esprit va être martelé par la répétition de la pratique. Il s’agit en somme de l’ascèse, de l’exercice, de la petite souffrance relative que constitue la pratique matin et soit. Mais c’est la seule issue pour que notre esprit ne devienne pas notre maître.

Le Bouddha Originel a enseigné, et c’est un renversement de la logique usuelle : « Si les actes du corps et de la parole relèvent du bien, l’acte de l’esprit, naturellement, sera le bien ». A l’ordinaire, tels le vieux Kant, nous nous disons que, si nous le voulons, à n’importe quel moment, nous pouvons nous lever de notre chaise en toute liberté. La raison en est que l’esprit, pour tout un chacun, est le maître décisionnaire du mouvement du corps. Or, c’est l’inverse ! C’est la qualité de la relation du corps à un objet, la production de ce même objet par la parole, qui vont devenir l’acte de bien de l’esprit. La dépollution de l’esprit découle donc d’un double acte physique : position du corps devant l’objet et récitation. Telle est du reste la position du maître Miao Le : « Même si sa pensée d’éveil n’est pas véritable, celui qui s’appuie sur l’objet correct obtiendra néanmoins de nombreuses œuvres et vertus ». Tout dépend donc de l’objet, et de la relation que l’on entretien avec lui.

Nancy : Lui aussi pratiquait devant un objet ?

Bien sur, Zhiyi aussi. Pour eux, c’était la fusion des trois vérités. Vacuité, conditionnalité et médianité.

Jean- Denis : Ce n’est pas un objet.

C’est pire que ça. Tout objet est la fusion des trois vérités. Comprenez bien que, lorsque Zhiyi déclare, à propos de la cérémonie dans les airs du sutra du Lotus : « L’assemblée ne s’est pas encore dispersée », c’est parce qu’il la « voit », qu’il y participe. Comme Zhiyi « voit » le Honzon physiquement, il sait naturellement quel est l’objet sur lequel la pensée doit se modeler. Pour autant, ce n’était pas son rôle que de matérialiser l’objet. Il ne pouvait pas non plus révéler Nam Myoho Renge Kyo, mais il le pratiquait pour lui-même. Son disciple, Tchang-ngan, a en effet affirmé qu’à la fin de sa vie le maître Zhiyi récitait toute la journée un mantra qu’il n’a jamais révélé. En outre, Zhiyi a fait de multiples commentaires très profonds sur les caractères chinois de Myo Ho Renge Kyo, alors même qu’il ne pouvait prononcer phonétiquement, à la japonaise, Myo Ho Renge Kyo. Il savait néanmoins que telle était la Loi.

 

Le vingt sixième Souverain de la Loi, Nichikan Shonin, a déclaré «  Le Honzon représente l’objet facteur de lien. L’objet suscite la sagesse et la sagesse guide la pratique. C’est pourquoi, si l’objet est incorrect la sagesse et la pratique, en conséquence, le sont aussi ». Ce n’est donc pas l’intention qui compte, c’est l’objet. La raison en est que, si tout est instantané, et c’est le cas, l’intention ne peut exister en soi. C’est un concept creux au même titre que celui de « concentration » ou d’acte « volontaire ».

L’objet vis à vis duquel on se met en relation, en lien, est double : il est visuel et phonétique. Visuel, c’est le Honzon, et phonétique, c’est Nam Myoho Renge Kyo. Il constitue en fait un objet unique. Cet objet est donc prioritaire, supérieur à la mauvaise foi, à l’ignorance, à la duplicité, ou aux désirs multiples du sujet. Ceci parce que l’humain ne perçoit jamais l’en soi de l’objet, de tout objet. Il ne perçoit qu’un phénomène subjectif qui n’est que la projection de son propre corps sur la réalité. Ne percevant pas l’état des choses, de l’enfer à l’éveil ultime, son sentiment intérieur, quel qu’il soit, est guidé par la sublimité de l’objet, le Honzon. Bien que le Bouddha Originel décrive le Honzon comme étant le lieu où les dix mondes, éclairés par Myoho Renge Kyo, retrouvent leur vénérable aspect originel, on ne peut le voir. Pratiquer devant le Honzon est donc le lieu de l’apparition du Corps de la Loi, le lieu de l’expression de la sagesse la plus haute. C’est la raison pour laquelle l’abandon de l’ascèse est pire que la mort. Concernant l’ascèse de l’abandon du moi : «  Ce qui est insignifiant, c’est cette douleur limitée qui procure l’éveil…On qualifie de mort le renoncement à l’ascèse et le retour aux habitudes » est-il dit.

« Ainsi ai-je entendu » est la première phrase d’un bon nombre d’écrits mahayanistes. « On dit que « ai-je entendu » est l’achèvement de l’écoute où « Je » signifie soi-même » a enseigné le Souverain de la Loi. Dans un commentaire, le grand maître Zhiyi a en outre précisé que, dans ce contexte « Je » est le Seigneur des oreilles. Le « Seigneur des oreilles » est ce qui préside à l’ordonnance provisoire de la capacité auditive. Dans la doctrine, le « Je » élevé, le « « Je » profond, est celui qui a été modifié par l’entendu. L’entendu désignant bien sur l’enseignement du Bouddha.

Le Bouddha guide les êtres avec la voix car sa voix montre la Loi. Il est dit : «  Le Bouddha guide les êtres avec la Loi. Il s’agit donc des trois grandes Lois ésotériques ». Lorsque le Bouddha enseigne la Loi aux êtres, à savoir Myoho Renge Kyo, le Honzon, et les divers concepts de la doctrine, on entend. Cet entendu, parce que nous le gardons en nous, que nous sommes disciples et que nous pratiquons matin et soir, va continuer à exister. Continuant à exister, notre « vue » va s’ouvrir aux objets désignés par les concepts transmis par le Bouddha. « Ainsi » va donc exprimer un « Je » modifié par l’entendu. Le Seigneur des oreilles, qui est, plus généralement, l’ordonnance provisoire et mobile de la faculté perceptive, ouvre donc la « vue » ancienne, l’ « audition » ancienne, à la qualité même des propos de l’Eveillé. Tous les sens vont donc se trouver enrichis, augmentés de l’éveil du Bouddha. Dans le sutra du Lotus nous lisons que l’œil bénéficiera de huit cent qualités, l’oreille de mille deux cent, le nez de huit cent, et ainsi de suite.

Inversement, d’ailleurs, entendre des choses mauvaises et les garder en soi réduit les capacités à la valeur de l’entendu. Ainsi les modifications, quoi que insensibles, des organes des sens, sont elles toujours orientées par la valeur en soi de l’entendu. « L’écoute détermine le beau et le laid de la vie humaine au cours des trois phases, passé, présent et futur… Pour ceux qui écoutent de mauvaises choses, s’en imprègnent et mettent en pratique les mauvaises choses qu’« ainsi ils ont entendues », tout devient véritablement terrible » enseigne le Souverain de la Loi. La raison en est que, tout le temps, quoi qu’on en pense, la pensée est un entendu. Et nous ne sommes pas les maîtres de cet entendu.

Le Bouddha Originel enseigne : «  D’une manière générale, la domination des illusions ne constitue pas la finalité du chapitre Durée de la vie. Celle-ci réside dans la capacité de comprendre que la substance des hommes ordinaires est, telle quelle, présente à l’origine ».

« On peut considérer le passé infini comme existant en permanence, depuis le sans commencement. En effet, la substance fondamentale de la Loi, Myoho Renge Kyo, est la simultanéité de la cause et de l’effet. Aussi, la Une pensée instantanée correspond telle quelle à l’éternité sans commencement. Cette Une pensée existe elle-même à l’origine, elle est présente en permanence et est sans commencement ni fin » enseigne le Souverain de la Loi.

 

Merci de votre attention.